Bon matin, sale monstre! [PV Andrew Adams] - TERMINÉ

Il pleuvait ce jour-là. La ville semblait malade. Privée de soleil, une pluie froide tombant depuis des heures. Ça ne semblait pas vouloir arrêter. L’eau s’accumulait dans les rues, de plus en plus désertes. Il devait être dix heures du matin. Pas loin, en tous cas. Et pour un samedi matin, c’était calme. Montréal au complet semblait se taire. Et ça lui donnait un air triste. Comme si une partie d'elle mourrait. Ce fait que la vie y étit, et qu'elle passait vite. Et pourtant, c'était toujours le cas, mais la pluie ne faisait que l'effet du brouillard.

Phillip fixait le ciel gris à travers la fenêtre du salon. Son appartement ne se trouvait pas au centre-ville, mais assez près d’une station de métro pour avoir accès au reste facilement. C'était un petit appartement, mais convenable pour un étudiant. Un toit pour pas cher, un chez-soi temporaire. Sans décoration, ni beauté particulière. Assez neutre. Mais c'était tout de même chez lui.

Des gouttes glissaient jusqu’en bas de la fenêtre. C’était plutôt apaisant. La pluie permettait de se sentir plus en sécurité à l’intérieur. Et d’apprécier le fait d’y être. Au chaud. Contre sa bien-aimée. Elle dormait encore, la tête sur ses cuisses. Elle semblait sereine. On aurait même dit qu’elle souriait. Sa respiration était lente et constante, il sentait son souffle chaud sur son genou. D’un geste posé et plutôt machinal, il caressait les cheveux d’Andrew. Le silence régnait.

Enfin… jusqu’à ce que un bruit fort, sourd, se fit entendre. On cognait à la porte.

Un bruit fort et étouffer. Andrew ouvrit les yeux, se redresse raide comme un pic, puis elle croisa le regard de Phillip. D’abord surprise, que faisait-elle ici? Dehors il tombait des clous, en plus des viaducs. Mais le regard chaud de Phillip la gardait au chaud. Elle se rappelait la nuit passée, à marcher, parler, se retrouver. Se retrouver. À ce moment, à cette penser, un sourire s’esquissa sur son visage, une petite lueur illumina son regard, toujours plongé dans celui du jeune homme à ces côtés. Ils étaient ensemble, ils se réveillaient ensemble. C'était bien son appartement, pourquoi le sofa aucune idée.
Elle passa une main dans ses chemins, gênée.

- Salut, lui dit-elle tout bas.

Puis on rencogna à la porte, aussi fort. Les deux tourtereaux se tournèrent en même temps vers la porte.

Phillip n’eut même pas le temps de répondre à Andrew. Les coups à la porte se faisaient insistants, et rapides. Quelqu’un voulait le voir, et maintenant. Il se leva donc, un peu hésitant, ne lâchant pas la main d’Andrew, qui ne fit que se lever avec lui et le suivre.

Malgré lui, son cœur battait à tout rompre. Peut-être de colère parce que quelqu’un avait osé péter la bulle de tranquillité entre lui et son amour, peut-être de peur parce que la personne semblait vraiment insister. Il approcha lentement de la porte, se demandant qui pouvait bien vouloir lui parler à cette heure, un samedi. Un ami? Non, il aurait averti avant. Alors qui? Il n’en avait pas la moindre idée, à vrai dire. Personne ne venait jamais chez lui. Au fait, il connaissait peu de monde ici, à Montréal, et ces rares personnes ne viendraient surement pas chez lui un samedi matin à l'improviste... Mais il avait tout de même une mauvaise impression. Et il ouvrit.

Oui. Une mauvaise impression. C’était ses parents.

- Maman... Papa...

C’est tout ce qu’il prononça, sans trop d’expression, comme figé. Il était bouche-bée. Que faisaient-ils là, à le regarder d’un mauvais œil, comme s’il avait quelque chose à lui reprocher? Certes, il n’était pas un ange, plutôt un monstre par rapport à la relation avec ses parents, mais pourquoi eux, ils ne l’avaient pas lâché? Ça devait faire au moins deux ans qu’ils ne les avaient pas vu… Alors pourquoi revenir, sans annoncer? Pour le prendre en flagrant délit, comme pour se trouver une excuse de le maudire un peu plus…

Alors il resta là, à fixer ses parents. Sa main se desserra et, sans trop le vouloir, se détacha de celle d’Andrew. Alors la mère de Phillip prit la parole, et d’un ton plein de reproche, de regret et plein d’autres choses, elle ne se contenta que de dire, amère, le nom de son fils :

- Oh, Phillip…

- Maman... Papa....



Andrew figea net. Dans la liste des choses auxquelles elle ce seraient attendu, il y avaient tueurs à gages et témoins de Jéhovah tout en haut. Les parents de son très récent petit-ami, n’y figuraient... Tout simplement pas. Eux, ici. Pas en Australie, ici. Il n’avait pas pu oublié ça, non, c’était impossible. Il n’avait pas de bonnes relations avec ses parents, mais à rester figés ainsi?

Lentement, mais sûrement, elle sentit la main de Phillip glissé, dérapée. Une pointe de panique fit son apparition, elle souhaitait avidement qu’il ne fasse pas ça... Il lâcha sa main et ferma son poing. Elle ferma les yeux, inspira et les rouvrit. Ça, ça fait mal, pensa-t-elle.

- Oh, Phillip…



C’était la femme, enfin, sa mère qui venait de parler. Elle ne comprenait pas le ton de reproche, de jugement dans sa voix. En fait, elle comprenait. C’était elle qui était au mauvais endroit au mauvais moment. Elle jeta un coup d’œil désespéré vers Phillip, mais il semblait l’être bien plus qu’elle. Elle ne l’avait jamais vu ainsi, peut-être une fois en fait. Mâchoires serrées, froid, distant, terrifié. Elle ne pouvait pas partir, ça ne se faisait pas. Rester non plus en fait, mais bon. Elle ne le laisserait pas tomber.


- Bonjour, lança-t-elle avec son sourire le plus charmant envers la dame en lui tendant la main. Je suis Andrew, vous êtes donc les parents de Phillip je présume?

Phillip vit les mâchoires de sa mère se serrer, comme si elle retenait un commentaire, ce qui était sans doute le cas. Après tout, ses parents, et surtout sa mère, avait toujours été très… pointilleux sur ses fréquentations. C’avait même été elle qui s’était réjoui la première des fiançailles de son cousin et de son ex. Elle savait ce que ça représentait pour Phillip… mais peut-être après tout Derek avait été plus parfait que lui, son propre fils.

Mais Phillip ne se laissa pas longtemps sombrer dans ses vieux souvenirs noirs. Il revint rapidement à la réalité, se rendant compte qu’un silence meurtrier s’était créé entre tout le monde, créant un malaise apparent. Et plutôt que de mentir, il alla droit au but – qui ne désigne pas vraiment la réalité, puisque c’était justement ce qu’il ne savait pas : le but de tout cela.

- Hum… maman, papa… je vous présente Andrew. Ma… ma copine.

L'atmosphère était palpable. Elle n'Avait jamais vue une femme aussi... de marbre. Expression désagréable figé, sans variations. Andrew retenait presque son souffle, ses présentations forcées se n'annonçaient guère un succès. Mais plutôt rempirer ce qui était déjà des retrouvailles désastreuses.


- Hum… maman, papa… je vous présente Andrew. Ma… ma copine



La jeune femme soupira de soulagement. Elle en avait vu de toutes les sortes, une amie, une escorte, la femme de ménage. Pour la première fois depuis fort longtemps, elle était ''la copine''. Un sourire plus naturle prit place sur son visage angélique et elle glissa sa main dans celle de Phillip, qui se déserra à sa plus grande satisfaction. Elle la serra fort. Ne me lâche pas une autre fois, supplia-t-elle intérieurement.

La pluie tombait encore, Phillip pouvait l’entendre sur la fenêtre près de lui. Soudainement, il aurait dit que la température de la pièce avait baissée de quelques degrés. Au loin, on entendait des grondements, comme si le tonnerre s’harmonisait avec le moment. Mais pourtant, il aurait juré qu’une étincelle de… de quoi? De bonheur, de joie, ou même de pitié peut-être, venait de s’allumer dans les yeux de son père. Mais elle s’était éteinte aussitôt, laissant place à son éternel air sévère. Sa mère, elle, n’avait pas cillé. Toujours aussi impénétrable. Indestructible.

- Alors… que faites-vous donc ici, à Montréal? Pourquoi ne pas m’avoir averti que vous partiez de l’Australie? demanda Phillip, commençant peu à peu à s’habituer à l’atmosphère de tension – après tout, il avait vécu assez longtemps avec eux…
- Tu blagues? J’ai essayé de te rejoindre au moins des centaines de fois! se laissa emporter sa mère. Ne t’a-t-on pas appris à quoi servait un téléphone!
- Eh bien, c’est que c’a été… assez rapide. Je veux dire… de dernière minute, précisa son père.

Le silence reprit place entre le quatuor, et Phillip en profita pour aller s’asseoir avec sa copine sur le divan, comme il y avait à peine quelques minutes de cela, et invita ses parents à faire de même. Une fois assit, c’est là qu’il remarqua comment ses parents fixaient Andrew, l’air intrigué. Phillip soupira, s’attendant au pire.

Phillip commençait enfin à se détendre un peu. Cependant, ses parents ne semblaient pas vouloir faire de même. Sa mère était toujours aussi impénétrable à toutes émotions de joie et son père... Semblait indécis peut-être? Une expression comme la surprise avait traverser son visage l’espace de quelques secondes.


- Alors… que faites-vous donc ici, à Montréal? Pourquoi ne pas m’avoir averti que vous partiez de l’Australie? demanda Phillip.

- Tu blagues? J’ai essayé de te rejoindre au moins des centaines de fois! se laissa emporter sa mère. Ne t’a-t-on pas appris à quoi servait un téléphone!


Andrew resta stupéfaite de la réaction impulsive, sinon méprisante, de la dame. Elle s’adressait tout de même à son propre fils qu’elle n’avait pas vu depuis longtemps!

- Eh bien, c’est que c’a été… assez rapide. Je veux dire… de dernière minute, précisa son père.


Il y avait quelque chose qu’Andie n’arrivait pas à déceller chez cet homme, mais quoi? Il avait radoucit la conversation, sans pour autant délaisser son air sévère. Phillip les invita à entrer, et ils prirent place dans ce qui lui servait de salon, une petit pièce confortable avec des fauteuils. La dame semblait jeté des regard désapprobateurs partout, et l’homme, lui, ne cessait de la dévisager.
Le plus discrètement possible, la jeune femme tourna ses yeux bleutés vers le jeune homme à ses côtés, intriguée.

Phillip voyait bien que quelque chose n’allait pas. Enfin… il y avait quelque chose qui préoccupait ses parents – eh bien, son père… sa mère était toujours comme ça. Son père avait remarqué quelque chose, semblait-il, mais quoi? Il avait beau chercher, mais il ne voyait pas. Il ne la connaissait pas du tout… En tous cas, c’est ce que croyais Phillip. C’est pourquoi la réaction de son père le surprit.

- Hum… Je ne vous ai jamais rencontré, mais pourtant, je jurerais vous reconnaître… Peut-être que…

Il ne finit pas sa phrase, comme il le faisait souvent.

- Voyons papa… Comment… Elle habite à Montréal, et vous en Australie…

Il se tourna vers Andrew, espérant une réponse quelqconque, et ne manqua pas de voir le regard noir que sa mère posait sur son père.

Décidément, le père de Phillip réfléchissait. Puis, il dit enfin quelque chose.


- Hum… Je ne vous ai jamais rencontré, mais pourtant, je jurerais vous reconnaître… Peut-être que…



Andie resta surprise, fronça les sourcils, ne sachant quoi répondre à cela.

- Voyons papa… Comment… Elle habite à Montréal, et vous en Australie…



Phillip le fit à sa place, et il avait en grande partit raison. Comment se seraient-ils rencontrés? Il était avocat, peut-être durant une enquête, une mission? Non, elle n’avait pas eu d’affaires en Australie depuis son entré à l’Agence. En tant qu’avocat à Montréal, peut-être avait-il déjà traité une affaire dans laquelle elle avait été impliquée ou confrontée. Non. Ce n’était pas ça.

- Vous savez, dit-elle finalement en riant, je ne sais pas trop où vous auriez pu me voir, je n’ai pas eu à faire souvent avec des avocats.



Elle s’arrêta, perplexe.


Il était avocat.....

Phillip retint son soufflé, se demandant pourquoi la conversation se dirigeait dans cette direction. Comment l’avait-il reconnu? Enfin… oui, comment il aurait bien pu la reconnaître?

- Ah eh bien voilà! Vous êtes bien la fille d’Adams? J’ai travaillé avec lui quelque fois, ici, à Montréal. Il avait les mêmes yeux que vous. Très particuliers. Vous lui ressemblez beaucoup, au fait.

Phillip se redressa, surprit. Alors ça, c’était complètement… bizarre. Quel hasard! Leurs pères qui s’étaient connus… Est-ce qu’il avait déjà vu Andrew, lui aussi? Quand il était tout jeune peut-être… Peut-être qu’ils avaient joués ensemble, pendant que leurs pères jouaient à des jeux bien plus complexes. Mais, sans doute pas. Après tout… ce n’étaient que des collègues. Reste que cette pensée était étrange.

La mère de Phillip, qui n’avait pas dit un mot depuis un moment et s’était contentée de regards, soupira et bougea dans sa chaise. Elle semblait inconfortable. Est-ce qu’elle cachait quelque chose, elle aussi?

Elle avait un doute, un doute invraisemblable en fait. Y aurait-il eu coïncidence? Elle n’y croyait pas vraiment, à ces choses là. Il ne lui disait rien, mais tout en même temps. C’était étrange, comme un déjà vu.

- Ah eh bien voilà! Vous êtes bien la fille d’Adams? J’ai travaillé avec lui quelque fois, ici, à Montréal. Il avait les mêmes yeux que vous. Très particuliers. Vous lui ressemblez beaucoup, au fait.



Voilà assez pour lui couper le souffle. La fille d’Adams, il n’y avait que les collègues de ses parents qui l’appelaient ainsi. Ses parents, le duo d’avocats, deux des plus efficaces au Québec durant leurs carrières. Il faut dire, de plus, que c’était coccasse, du fait que sa mère était avocate de la défense et que son père avocat de l’attaque. Souvent, s’était comme un match de hockey marqueur contre gardien de but. Et pourtant ils s’étaient toujours entendues à merveille, ils avaient su s’aimer en laissant leur boulot de côté. Ses parents, ce qu’ils pouvaient lui manquer, même après sept ans.

Et cet homme, elle revoyait son visage. Le cadre, sur la cheminée. Ses parents au golf, lors de leur dernier déplacement pour le travail à Montréal, quelques semaines avant l’accident. Ils étaient photographiés tous les trois.


- Merci, murmura-t-elle tout simplement, troublée.



On ne lui avait jamais reparlé de ses parents, jamais....

Ce merci, qui n’était pas réellement une réponse à une question, mais tout de même réel. Dans ce seul mot, il avait senti toute une histoire défiler, comme si en un souffle elle venait d’expirer ce qu’elle retenait depuis si longtemps. Ce n’était pas la première fois que Phillip l’entendait parler de ses parents, mais cette fois, c’était la plus explicite. Ce mot voulait en quelque sorte tout dire. Mais pourtant, il avait encore ce sentiment, au plus profond de lui, qu'il ne savait rien d'elle. Mis à part le fait qu'il savait que ses parents étaient morts, que savait-il réellement d'elle? Pas grand chose, en fait.

La mère de Phillip semblait de plus en plus inconfortable, comme si elle n’était plus capable de tenir en place. Avait-elle quelque chose à lui avouer, à lui annoncer? C’est ce qu’il avait cru depuis le début. Mais il ne savait toujours pas la vraie raison du déplacement de ses parents. Mais il ne se le demanda pas trop longtemps, il passait déjà à l’expression de son père.

Il semblait avoir resté surpris devant la réponse d’Andrew. Il échappa un rire, encore sous le choc de ce hasard. Il avait bien aimé travailler avec Adams. C’était de ces hommes qui n’étaient pas froid comme de la glace, qui pouvait bien rigoler de temps en temps. Il se rappelait encore du cas sur lequel il avait travaillé ensemble… Une affaire de meurtre. Ouais, il avait bien aimé travailler avec lui… Mais qu’était-il devenu?

- Toujours aussi têtu, ton père?

Phillip ravala sa salive. Son père venait de prendre une route qu’il n’aurait pas dû prendre.

- Papa…

- Toujours aussi têtu, ton père?


Andrew resta figée de glace. Elle ouvrit la bouche pour répondre, avec un mince sourire, mais aucun mots n’auraient pu formuler une réponse.


- Papa…



Phillip. Il devait être tellement mal à l’aise.... Peut-être autant qu’elle. En fait ce n’était pas un malaise, plutôt une sorte de surprise, on l’avait fortement prise au dépourvue. D’abord elle se réveillait avec Phillip, réveil dû à l’arrivé improvisé des parents de se derniers qui s’avéraient maintenant connaître les siens. Quelle journée de fous, pensa-t-elle lentement.


- En fait j’imagine, dit-elle finalement en levant les yeux vers l’homme. Sûrement encore obstiné à ne pas vouloir teindre ses cheveux grisonnant, malgré les menaces de ma mère, Rebecca. Vous avez sûrement déjà dû travaillez avec elle aussi.


Elle soupira. C’était la discussion la plus longue qu’elle avait eu sur ses parents depuis leur enterrement, songea-t-elle ironiquement. Mais c’était avec Phillip qu’elle aurait voulu l’avoir, avec lui et lui seul.

- Vous n’avez pas appris la nouvelle, n’est-ce pas? Ça va bientôt faire dix ans, aujourd’hui, déclara-t-elle désolé.

Le père de Phillip resta figé, mal à l’aise. Non, il n’avait pas su. Après tout, la nouvelle de la mort d’un avocat de Montréal ne s’était pas rendue en Australie… Mais il s’en voulut quand même. Il se sentait stupide. Il n’aurait pas pu savoir, mais il se sentait coupable. Ça devait être tellement dur pour elle… perdre son père. Il avait lui-même perdu son père, mais il était plus vieux, malade. Ce n’était pas une tragédie.

Sa femme la regardait, arborant un semblant d’expression de déception, ne se préoccupant même pas d’être le moins du monde compatissante avec Andrew. Mais ce n’était pas tellement surprenant. Nadia Lafleur était une femme qui ne semblait pas se préoccuper ce qui était à l’extérieur de son propre monde.

- Jake, dit-elle, implacable, d’un ton de reproche.

Et comme si tout le monde avait passé par-dessus cette nouvelle, comme elle l’avait fait, elle se leva et croisa les bras, fixant Andrew, se disant que finalement elle pourrait bien être correcte, après tout. Fille de deux avocats, assez jolie… Oui, elle était bien. Mais connaissant son fils, était-elle… recommandable?

- Phillip. Je n’irai pas par quatre chemins. Nous sommes venus ici avec une intention bien précise.

Elle prit une pause, osant enfin poser le regard sur son fils.

- Nous retournons en Australie dans deux jours.

Jacob regardait sa femme d’un air intrigué. Certes, il savait lui-même pourquoi ils étaient venus. Mais pourquoi avait-elle choisit ce moment-là pour tout annoncer à leur fils? Ce n’était pas tellement approprié… Et pourquoi ne pas attendre, encore un peu? Rien ne pressait tant que ça…

- Et nous avons la ferme intention de te ramener avec nous.

Elle avait observer la dame chercher une place sur le fauteuil, cette mère dévisager son fils, se lever, marcher, la jauger de son regard froid emplis de jugement. Désapprouvé tout ce qu’il pouvait bien avoir dans cette pièce, dans la discussion, dans la vie de son fils. Une femme sans émotion, sans compassion.

Elle marchait, elle allait dire la raison de leur visite à l’improviste.

Le père de Phillip protesta, en effet c’était un moment délicat, elle s’en foutait pas mal celle-là, de ses parents, n’est-ce pas?

Dieu soit louer, songea-t-elle après la déclaration, ils partent dans deux jours... Quoique... Phillip.... Il avait la chance d’avoir ses parents, bien que ce soit tendu, ils étaient là. C’était égoïste comme réjouisment, vouloir l’avoir à elle seule....

-- Et nous avons la ferme intention de te ramener avec nous

La jeune femme avala de travers, c’était impossible.


- Phillip?, se risqua-t-elle en tournant le tête vers lui, hésitante.

Phillip faillit s’évanouir. Il se sentit faiblir pendant un instant, ou quelque chose comme ça. Quoi? Mais ils étaient complètement fous! Non, mais il savait qu’ils voulaient contrôler sa vie, mais à ce point-là? Il sentit une rage monter peu à peu dans lui, il sentait qu’à n’importe quel moment, il pourrait exploser. Vraiment, quel culot! Pourtant, il avait tant de fois expliqué son point de vue, qu’il voulait faire ces propres choix, et tout le blabla. Il n’aurait pas pu détester plus ses parents qu’à ce moment-là. S’ils étaient venus lui dire ça quelques semaines plus tôt, il n’aurait peut-être pas protesté, mais maintenant qu’Andrew et lui étaient à nouveau réunis, la possibilité de partir était exclue. Vraiment.

Pourtant, sa mère ne semblait pas partager cette impression. Pour elle, ça semblait certain : elle ne partirait pas sans lui. Et Dieu sait comment elle était têtue. Immobile, les mains sur les hanches, elle attendait que son fils lui dise un oui, obéissant, tout parfait. Mais sans doute qu’au fond, elle ne s’y attendait pas tant que ça… Après tout, elle connaissait un minimum son fils.

À côté d’elle, son mari, les lèvres fermées, avait repris son sérieux, semblant maintenant redevenir la personne froide et distante que Phillip était si bien capable de détester. Il l’avait enfin sentit sympathique, de son côté. N’était-ce là qu’une illusion. Qu’il avait pu être stupide de croire son père de son côté…

- Ne comptez pas sur moi, dit Phillip, furieux. Pour une fois que je me sens bien, heureux… ce n’est pas vous qui viendrez tout briser ça. Désolé, mais trouver-vous quelqu’un d’autre pour votre troisième billet d’avion. Je ne viendrai pas avec vous!

- Ne comptez pas sur moi, dit Phillip, furieux. Pour une fois que je me sens bien, heureux… ce n’est pas vous qui viendrez tout briser ça. Désolé, mais trouver-vous quelqu’un d’autre pour votre troisième billet d’avion. Je ne viendrai pas avec vous!




Mi-surprise, mi-épatée, Andrew gardait le regard sur Phillip. Il était furieux, très. Les machoirs serrés, une froide expression dans ses yeux. Phillip, d'habitude si réserver, timide même. Pour une fois, il levait le ton et il était catégorique, il obéissait à ses propres règles. Bon sang qu'elle l'aimait, pensa-t-elle. Il avait décider de rester, peut-être pas pour elle, mais il n'était pas partit! Il restait! Il ne la quittait pas, il la choisissait elle, elle et Montréal, au lieu de ses propres parents. Décidement c'était égoiste, très. Mais... Tellement rassurant, bon à entendre.

Une expression de déception. Une autre de « Je le savais ». C’est de cette façon que sa protestation avait été accueillie. Décidemment, ses parents ne le prenaient pas au sérieux. Et pourtant, il n’avait jamais été aussi sérieux. C’était la vérité, il voulait tellement rester là, avec Andrew. Il se sentait bien avec elle. Il était heureux. Et il ne le serait jamais en Australie avec ses parents… L’Australie était en soit un souvenir sombre, déplaisant. Et un souvenir, c’est fait pour garder dans le passé. Du moins, le plus possible…

- Phillip, continua sa mère, d’un ton déchirant. Nous tenons à ce que tu aille un futur… Peut-être es-tu heureux dans le présent, mais ne penses-tu pas à dans quelques années? Nous le faisons pour toi. Tu dois revenir en Australie, poursuivre tes études. Pour ton bien.

Phillip se retenu de lui sauter au visage. Pour son bien? C’était la blague la plus stupide du monde. Pour son bien! S’ils voulaient vraiment son bien, ils n’avaient qu’à partie et le laisser vivre sa vie comme un adulte. Après tout, ‘est ce qu’il était. Il était bien capable de gérer tout ça seul, sans l’aide de ses parents. Pourquoi, après tant de temps, ils venaient remettre leur nez dans sa vie? Ce n’était pas la leur! Ils n’avaient qu’à le laisser tranquille!

Phillip baissa les yeux, se retourna vers Andrew et serra encore plus fort sa main. Non, il ne la laisserait pas tomber.

- Phillip, continua sa mère, d’un ton déchirant. Nous tenons à ce que tu aille un futur… Peut-être es-tu heureux dans le présent, mais ne penses-tu pas à dans quelques années? Nous le faisons pour toi. Tu dois revenir en Australie, poursuivre tes études. Pour ton bien.


C'était injuste, traité son propre fils ainsi. Il serra sa main, un peu plus fort. Elle leva les yeux, croisa les siens. Ce n'était plus de la colère, ni de l'inquiétude, juste un regard tendre, rassurant peut-être. Il soupira, elle avec. Yeux dans les yeux, un cocus silencieux. L'air de dire je ne partirai pas, pas sans toi. Et elle qui ne pouvait que supplier reste, reste. Elle détourna le regard, anxieuse, et le plongea dans celui de la femme debout devant eux. Elle se leva à son tour. Cette dame ne savait pas à qui elle avait à faire.


- Vous sous-estimez très lourdement votre fils. Comment pouvez-vous douter en son avenir, ne l'avez-vous jamais vu sur un ring, enseigner sa discipline ou encore l'entendre en parler. Non, désolé, pas l'entendre, l'écouter. Il à de l'aveniir, vous n'avez pas le droit de dire le contraire, finit-elle froidement, très sérieuse.

Phillip n’eut pas tellement de réaction à ce qui sortit de la bouche d’Andrew. Non, il n’était pas surpris. Peut-être s’en attendait-il. Mais peu importe, il sentait bien à ses côtés, à ce moment-là, à se battre avec elle. Parce que de tous les combats qu’il avait fait, c’était sans doute le plus dur. Peut-être à cause du regard de sa mère, l’indifférence de son père ou simplement le fait qu’il n’avait le soutien d’aucun des deux. Ou toutes ces réponses. Mais ça n’avait pas d’importance. La haine, elle, elle était là. Bien présente. Et elle allait de paire avec une colère de plus en plus grande. Il ne pouvait qu’exploser. Mais tout ce qu’il trouva à dire, ce fut sur un ton de défaite. Parce qu’après tout, c’est lui qui perdait ses parents, leur soutien. Le contraire ne semblait pas tellement dramatique… en tous cas pour les parents que lui avait.

- Non. Elle ne l’a jamais fait. Ni lui. Je ne suis qu’un échec, rien de plus, à leurs yeux.

C’est chez sa mère qu’il vu le changement en premier. Comme si l’être froid qu’elle était fondait, et que tout ressortait par les yeux. Des larmes, comme si enfin elle se rendait compte de quelque chose. Mais vite son expression glaciale revint. Phillip baissa les yeux, comme si l’espoir n’était plus tellement dans son dictionnaire à lui. Et lorsqu’il les remonta, il vit son père. Les yeux vides, vitreux. Les mâchoires serrées. Peut-être qu’au fond, ses parents savait ce qu’était la compassion.

Tout ce que son cerveau pu analyser dans les secondes qui suivirent, c’était la vision de sa mère qui sortait, d’un pas chancelant, et son père qui la suivait, sans quitter Phillip du regard, comme s’il essayait de lui dire qu’il n’avait pas eu le droit… Comme s’il le jugeait, par un seul regard, comme s’il le condamnait, que c’était lui le coupable.

Et il était un avocat… Phillip ne pu que le croire.

- Non. Elle ne l’a jamais fait. Ni lui. Je ne suis qu’un échec, rien de plus, à leurs yeux.



Andrew tourna la tête vers Phillip, troublée, peinée. Il ne pouvait pas penser ça, non, c’était son Phillip, il n’y avait rien d’autre que lui pour elle. Il était tout sauf un échec, chaque combat, chaque coups, chaque mots étaient une réussite. Mais c’était ce qu’il pensait, à cause d’eux.

Andie les regarda, la dame laissa couler une larme, avant qu’une froide carapace de fierté et d’indignation ne fendirent sont visage. Elle prit la direction de la porte. Andrew la regarda partir, vit l’homme la suivre, laissant trainé un regard déçus sur son fils. Il voulait le faire sentir coupable, quoi? De quel droit le jugeait-il ainsi!? Ils avaient débarquer à l’improviste après deux ans pour le ramener, ils s’attendaient à quoi?
Ils sortirent, fermèrent la porte.


Andrew se tourna vers Phillip, il fixait un point invisible, la tête baissé. Ça lui fendait le cœur, le voir comme ça. Elle ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais préféra se taire. Elle porta une main à son visage, doucement. Sa main quitta la sienne et elle le serra fort.


- Si t’étais vraiment un échec, t’aurais pas changer ma vie Phillip, murmura-t-elle à son oreille.

- Échec et mat.

La reine est plus forte que le roi, et c’est elle qui part se battre, non? La reine Andie, la reine de son royaume, celle qui le protégeait. Celle qu’il aimait. Mais la vie n’était pas un jeu, après tout. Il n’avait besoin de rien d’autre au monde à part elle. Elle le comblait, il n’avait pas besoin de ses parents. S’ils n’étaient pas heureux de ses choix, de son bonheur à lui, alors qu’ils partent. Qu’ils retournent à leur vie froide et silencieuse. Non, il n’avait pas besoin d’eux, de leurs regards distants, de leurs paroles blessantes. Ils vivraient sans eux, s’il le fallait. Oui, maintenant il le savait. Il le savait vraiment. Ses parents ne pouvaient pas vivre avec un fils différents d’eux, qui n’étaient pas exactement de la façon qu’il le voulait. Alors tant pis. Phillip ne changerait pas. Pas pour eux. Ça n’en valait pas la peine.

L’ombre d’un sourire apparut sur son visage. Le toucher de ses mains douces, chaudes. Réconfortant. Non, il ne la perdrait pas pour ses parents. Qu’ils vivent avec. Non, il resterait avec elle, il ne retournerait pas en Australie. Il n’arrêtait pas de se le répéter, peut-être pour ne jamais l’oublier. Il l’avait enfin, le vrai bonheur. Comment pourrait-il le laisser tomber?

- Je t’aime, dit-il, tout bas.

Puis, fermant la porte, il retourna s’asseoir sur le divan, comme à peine quelques minutes plus tôt. Par la fenêtre, il voyait le soleil se pointer le bout du nez à travers les nuages gris.